Application immédiate de la loi MACRON du 6 août 2015 modifiant les conditions de l’action civile en démolition
L’article 111 de la loi dite « Macron » du 6 août 2015 a modifié l’article L. 480-13 du Code de l’urbanisme, qui limite la possibilité pour les tiers d’engager une action en démolition devant les juridictions civiles afin de sécuriser les opérations d’urbanisme.
Il importe de rappeler que l’annulation de l’autorisation d’urbanisme constitue une condition préalable impérative pour solliciter la démolition, en vertu du texte de l’article L.480-13 du code de l’urbanisme :
« Lorsqu'une construction a été édifiée conformément à un permis de construire :
1° Le propriétaire ne peut être condamné par un tribunal de l'ordre judiciaire à la démolir du fait de la méconnaissance des règles d'urbanisme ou des servitudes d'utilité publique que si, préalablement, le permis a été annulé pour excès de pouvoir par la juridiction administrative »
Il en va de même pour la demande de dommages intérêts :
« 2° Le constructeur ne peut être condamné par un tribunal de l'ordre judiciaire à des dommages et intérêts que si, préalablement, le permis a été annulé pour excès de pouvoir ou si son illégalité a été constatée par la juridiction administrative. L'action en responsabilité civile doit être engagée au plus tard deux ans après l'achèvement des travaux.
Lorsque l'achèvement des travaux est intervenu avant la publication de la loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement, la prescription antérieure continue à courir selon son régime. »
Aux termes de son article 111, modifiant l’article L. 480-13 du Code de l’urbanisme, l’action civile en démolition ne peut plus être exercée que dans certaines zones :
« Lorsqu'une construction a été édifiée conformément à un permis de construire :
1° Le propriétaire ne peut être condamné par un tribunal de l'ordre judiciaire à la démolir du fait de la méconnaissance des règles d'urbanisme ou des servitudes d'utilité publique que si, préalablement, le permis a été annulé pour excès de pouvoir par la juridiction administrative et si la construction est située dans l'une des zones suivantes :
a) Les espaces, paysages et milieux caractéristiques du patrimoine naturel et culturel montagnard mentionnés au II de l'article L. 145-3, lorsqu'ils ont été identifiés et délimités par des documents réglementaires relatifs à l'occupation et à l'utilisation des sols ;
b) Les espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques mentionnés à l'article L. 146-6, lorsqu'ils ont été identifiés et délimités par des documents réglementaires relatifs à l'occupation et à l'utilisation des sols ;
c) La bande de trois cents mètres des parties naturelles des rives des plans d'eau naturels ou artificiels d'une superficie inférieure à mille hectares mentionnée à l'article L. 145-5 ;
d) La bande littorale de cent mètres mentionnée au III de l'article L. 146-4 ;
e) Les cœurs des parcs nationaux délimités en application de l'article L. 331-2 du code de l'environnement ;
f) Les réserves naturelles et les périmètres de protection autour de ces réserves institués en application, respectivement, de l'article L. 332-1 et des articles L. 332-16 à L. 332-18 du même code ;
g) Les sites inscrits ou classés en application des articles L. 341-1 et L. 341-2 dudit code ;
h) Les sites désignés Natura 2000 en application de l'article L. 414-1 du même code ;
i) Les zones qui figurent dans les plans de prévention des risques technologiques mentionnés au I de l'article L. 515-16 dudit code, celles qui figurent dans les plans de prévention des risques naturels prévisibles mentionnés aux 1° et 2° du II de l'article L. 562-1 du même code ainsi que celles qui figurent dans les plans de prévention des risques miniers prévus à l'article L. 174-5 du code minier, lorsque le droit de réaliser des aménagements, des ouvrages ou des constructions nouvelles et d'étendre les constructions existantes y est limité ou supprimé ;
j) Les périmètres des servitudes relatives aux installations classées pour la protection de l'environnement instituées en application de l'article L. 515-8 du code de l'environnement, lorsque les servitudes instituées dans ces périmètres comportent une limitation ou une suppression du droit d'implanter des constructions ou des ouvrages ;
k) Les périmètres des servitudes sur des terrains pollués, sur l'emprise des sites de stockage de déchets, sur l'emprise d'anciennes carrières ou dans le voisinage d'un site de stockage géologique de dioxyde de carbone instituées en application de l'article L. 515-12 du même code, lorsque les servitudes instituées dans ces périmètres comportent une limitation ou une suppression du droit d'implanter des constructions ou des ouvrages ;
l) Les aires de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine créées en application de l'article L. 642-1 du code du patrimoine ;
m) Les périmètres de protection d'un immeuble classé ou inscrit au titre des monuments historiques prévus aux quatrième et cinquième alinéas de l'article L. 621-30 du même code ;
n) Les secteurs délimités par le plan local d'urbanisme en application des 2° et 5° du III de l'article L. 123-1-5 du présent code ;
o) Les secteurs sauvegardés créés en application de l'article L. 313-1.
L'action en démolition doit être engagée dans le délai de deux ans qui suit la décision devenue définitive de la juridiction administrative ; »
Dans un arrêt en date du 23 mars 2017, la 3ème Chambre civile de la Cour de cassation a précisé que ces nouvelles dispositions sont immédiatement applicables, y compris aux instances en cours (Civ. 3e, 23 mars 2017, FS-P+B+I, n° 16-11.081) :
Un pétitionnaire avait obtenu, en 2008, un permis de construire en vue de réaliser un immeuble à usage d’habitation comportant notamment des panneaux solaires.
Ce permis de construire a dans un premier temps été annulé par le Tribunal administratif à la requête des voisins du projet, qui ont, ensuite, saisi le Juge civil pour obtenir la démolition.
La Cour d’appel d’Aix-en-Provence avait fait droit à la demande des voisins ordonné la démolition sous astreinte de la construction litigieuse sur le fondement de l’article L. 480-13 du code de l’urbanisme, tel que modifié par l’ordonnance n° 2005-1527 du 8 décembre 2005, abrogé à la date de sa décision.
La Cour de cassation casse cet arrêt aux motifs suivants :
« Attendu que, pour accueillir la demande de démolition, l’arrêt retient que le permis de construire a été annulé par la juridiction administrative dès lors qu’il ne respectait pas les dispositions du plan d’occupation des sols relatives à la hauteur des constructions et que la violation de la règle d’urbanisme est à l’origine du préjudice subi par M. et Mme C. ; Qu’en statuant ainsi, alors qu’une loi nouvelle s'applique immédiatement aux effets à venir des situations juridiques non contractuelles en cours au moment où elle entre en vigueur, même lorsque semblable situation fait l'objet d'une instance judiciaire, la cour d’appel a violé le texte susvisé ; »
L’affaire est donc renvoyée devant la Cour d’appel d’AIX EN PROVENCE autrement composée, qui devra statuer sur la demande de démolition en faisant application de ce principe dégagé par la Cour de cassation.
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