VENTE IMMOBILIERE : que se passe-til si l'acquéreur n'obtient pas son prêt immobilier ?
L’acquéreur qui signe un compromis de vente est-il tenu de verser une indemnité d’immobilisation au vendeur s’il n’obtient pas son prêt bancaire ?
Le principe est que la condition suspensive insérée dans la promesse de vente, ou dans le compromis, lui permet de renoncer à son achat sans indemniser le vendeur.
L'article 1304 du code civil dispose ainsi que :
"L'obligation est conditionnelle lorsqu'elle dépend d'un événement futur et incertain.
La condition est suspensive lorsque son accomplissement rend l'obligation pure et simple.
Elle est résolutoire lorsque son accomplissement entraîne l'anéantissement de l'obligation."
L’article 1304-3 du Code civil précise quant à lui que :
"La condition suspensive est réputée accomplie si celui qui y avait intérêt en a empêché l'accomplissement.
La condition résolutoire est réputée défaillie si son accomplissement a été provoqué par la partie qui y avait intérêt. "
L’article L.312-16 du code de la consommation dispose en outre que :
« Lorsque l'acte mentionné à l'article L. 312-15 indique que le prix est payé, directement ou indirectement, même partiellement, à l'aide d'un ou plusieurs prêts régis par les sections 1 à 3 et la section 5 du présent chapitre, cet acte est conclu sous la condition suspensive de l'obtention du ou des prêts qui en assument le financement. La durée de validité de cette condition suspensive ne pourra être inférieure à un mois à compter de la date de la signature de l'acte ou, s'il s'agit d'un acte sous seing privé soumis à peine de nullité à la formalité de l'enregistrement, à compter de la date de l'enregistrement.
Lorsque la condition suspensive prévue au premier alinéa du présent article n'est pas réalisée, toute somme versée d'avance par l'acquéreur à l'autre partie ou pour le compte de cette dernière est immédiatement et intégralement remboursable sans retenue ni indemnité à quelque titre que ce soit. A compter du quinzième jour suivant la demande de remboursement, cette somme est productive d'intérêts au taux légal majoré de moitié. »
Le vendeur ne peut exiger que l’acquéreur produise des refus de prêt suffisamment motivés.
Une jurisprudence constante affirme en effet que le caractère d'ordre public de l'article L. 312-16 du code de la consommation interdit la stipulation d'obligations contractuelles imposées à l'acquéreur de nature à accroître les exigences du texte (Civ.3, 07.11.2007, n°06-17867)
Dans un arrêt en date du 28 mai 2013, la 3ème chambre civile de la Cour de cassation a rappelé que, lorsque les caractéristiques du prêt étaient rappelé dans l’attestation de dépôt ou dans la lettre de refus de prêt, la faute du bénéficiaire ne peut être retenue :
« Attendu que pour condamner M. X... à payer à Mme Y... la somme de 250 000 euros au titre de la clause pénale, l'arrêt, après avoir constaté que celui-ci produisait une attestation du 29 août 2007 de la caisse de crédit agricole mutuel du Languedoc du dépôt de sa demande de prêt, la lettre de refus de cette banque du 13 juin 2008 et une lettre de la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Finistère du 11 juillet 2008, retient que, faute par M. X... de justifier d'une demande de prêt conforme aux caractéristiques convenues, la condition suspensive est réputée accomplie ; Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans s'expliquer, comme elle y était invitée, sur l'attestation de la caisse de crédit agricole mutuel du Languedoc du 12 mars 2008 confirmant la précédente du 29 août 2007, qui indiquait les caractéristiques du prêt demandé par M. X... et faisait référence à son offre d'achat, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ; » (Civ.3, 28.05.2013, n°12-15339).
Dans un arrêt en date du 29 janvier 2015, la Cour d'appel de VERSAILLES a ainsi jugé que :
« Dans ces conditions, ils ont justifié de ce que la condition suspensive relative au financement ne s’était pas réalisée, sans aucune responsabilité de leur part, les allégations de M. X, selon lesquelles les refus de prêt produits par M. et Mme Y seraient de “complaisance” au regard de l’aisance de leur situation patrimoniale, étant dénuées de portée, la seule obligation pesant sur les acquéreurs étant de solliciter un prêt conforme aux stipulations contractuelles, sans qu’ils aient à justifier de la pertinence des refus qui leur ont été opposés. »
Si l’acquéreur n’a reçu aucune offre de prêt conforme aux stipulations de la promesse, la condition d’obtention d’un prêt ne s’est pas réalisée, de telle sorte que la promesse est caduque (Cour d'appel VERSAILLES, 3ème Chambre, 22.11.2011, RG : 10/01480).
Il en va ainsi même si l’acquéreur n’a pas déposé sa demande de prêt dans les délais qui lui étaient imposés par la promesse de vente, ainsi que l’a jugé la Cour de cassation dans un arrêt en date du 15 septembre 2016 (Civ.3, 15.09.2016, n°14-29438).
Si le vendeur refuse que le Notaire rembourse l’indemnité d’immobilisation à l’acquéreur, celui-ci pourra saisir le Tribunal pour obtenir ce remboursement.
En revanche, si la demande de prêt s’écartait des dispositions contractuelles, la condition suspensive doit être considérée comme réalisée, et l’acquéreur qui refuserait d’acheter en raison de son refus de prêt se verrait condamné à verser au vendeur le montant de l’indemnité d’immobilisation prévu par le compromis ou la promesse de vente (Civ.3,20.11.2013, n°12-29021).
Il en va de même si l’acquéreur était manifestement susceptible d’obtenir son prêt, et qu’il a depose sa demande de prêt hors délais.
Dans cette hypothèse, si l’acquéreur refuse que le Notaire verse l’indemnité d’immobilisation au vendeur, celui-ci sera recevable et bien fondé à solliciter le paiement de cette somme en Justice.
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